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Interview : Stereo Utopia, l’électron libre

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Temps de lecture : 3 min

J’ai découvert Stereo Utopia en matant la chaîne Youtube Beats & Culture du label Melting Records et on l’avait partagé avec vous sur la playlist Sober November. Mais Stereo Utopia n’est qu’un side project du beatmaker Spectateur. Plus j’avançais dans mes recherches pour cette interview, plus je découvrais ses liens avec d’autres collectifs. Il fait partie de ces artistes pour qui l’image seconde la musique. Et on ne peut lui donner que raison tant le travail de recherche de samples est pointu dans le beatmaking. Il a affiné son style en voyageant, rencontrant des collectifs un peu partout autour du monde, d’où les nombreuses influences de style et de culture dans ses samples. Poésie, douceur, mélancolie, nostalgie, gaieté… Spectateur parle d’émotions ! Il nous explique un peu son parcours, sa formule magique pour dénicher ses sons, et donne quelques refs à écouter !

Photo Stereo Utopia aka Spectateur prise sur Bandcamp

Pour les Sacassonneurs qui ne te connaissent pas encore, comment décrirais-tu tes projets?

Je fais du son depuis une vingtaine d’années environ, sous plusieurs noms mais toujours du beatmaking, surtout avec des samples. À la base, je suis sous le nom de Spectateur, abstract hip-hop / triphop. C’est en général très mélancolique et mélodique.

Pour La Terra Madre sorti l’année dernière, tu puises dans une vaste étendue de sonorités (rock turc, amérique du sud, hip-hop…) quelle est l’histoire de cet album?

J’avais envie de faire des choses un peu plus ensoleillées et enjouées, une réponse à la déprime du confinement. Avec l’équipe grecque de Melting Records, on a créé Stereo Utopia. L’idée était de sampler des sons des années 60-70 autour du monde, je suis pas mal fan de ces époques, il y a une énergie commune. C’est un projet qui rend hommage à toutes ces musiques. Contrairement au projet Spectateur, j’avais pas envie de trop triturer les samples. Je voulais trouver des morceaux qui me plaisent vraiment sans trop les transformer, en gardant les vibes. Ces musiques peuvent parler à tout le monde.

Stereo Utopia – Instanbul Rockers sur l’album La Terra Madre

Comment t’es tu rapproché de ce label grec?

C’est grâce au collectif Tour de Manège. J’avais commencé par jouer dans les soirées Nobles Silences organisées par DLoaw. Il était très connecté avec les gars de Melting vu qu’il a vécu là-bas. La vraie rencontre s’est faite pendant mes vacances en Grèce. Je leur ai écrit, histoire de faire quelques concerts sur place et se marrer un peu et le feeling est tout de suite passé. On est devenu potes grâce à un mail ! C’est la beauté de la musique, on se connecte avec pleins de gens facilement !

C’est quoi la différence avec Spectateur?

Spectateur c’est beaucoup plus personnel. C’est ce que je fais depuis l’adolescence, naturellement depuis le début. C’est aussi plus introspectif, avec des morceaux plus mélancoliques. Une invitation au voyage mental, au petit nuage.

Où déniches-tu tes sons ?

Partout ! Vinyles, ça coute un peu trop cher donc peu. Ensuite beaucoup sur internet, il n’y a pas de limite. Pas mal de labels font des ré-éditions de vieux albums. Je regarde un peu le nom des musiciens, des producteurs etc… Je fais des recherches et vois par exemple si ces musiciens ont eu d’autres groupes…J’espionne un peu partout !

Le point commun de 90% des beatmakers c’est de très peu se montrer, se mettre en scène en clip ou en photo. C’est un réel désintérêt pour l’image?

Pour en avoir rencontrer beaucoup, on a ce point commun de ne pas être les personnes qui extériorisent le plus. Y’a pas de grandes gueules chez les beatmakers. On aime assez rester à la maison et écouter de la musique toute la nuit. Ça ne pousse pas à vouloir se montrer absolument partout, et si c’est ton but tu choisis pas cette discipline ! Faire des vidéos on y pense pas spécialement, la musique prime. Avec ces styles, t’as pas de paroles. Et tu vas pas te filmer en train de faire semblant de rapper ! Le but c’est que le morceau provoque des images chez les gens. Le plus « naturel » c’est de faire de l’animation ou des trucs un peu plus contemplatifs. Tout le monde se met tout le temps en scène et se crée une vie parallèle avec les réseaux. Peut-être que moins tu en montres et plus tu peux susciter de l’interêt aussi à l’inverse.

Stereo Utopia – Something For You sur l’album La Terra Madre – video Brian Barneclo

Tu produis aussi d’autres artistes?

Non pas énormément. J’ai eu des projets avec des potes rappeurs, les rappeurs de ta ville en gros. par exemple, j’ai eu le projet Bypass avec 4 rappeurs et 1 beatmaker d’Austin au Texas et 4 autres rappeurs avec moi en beatmaker. On a fait deux tournées en France et au États-Unis. Je produisais en général pour le plaisir de faire des concerts, sans être trop exposé. Produire des rappeurs c’est vite compliqué : tu leur envoies des prods, ils les mettent de côté parce que ça leur plait et 3 ans après t’as pas de news ! Un jour, ils te disent qu’ils vont sortir le morceau mais toi t’as déjà plus les pistes parce que t’en a fait 1000 autres depuis. J’aime bien quand c’est fluide et que les choses se font naturellement mais pour l’instant, j’ai pas trouvé de rappeur avec qui cela fonctionne comme ça.

Quels sont tes coups de cœur musicaux à nous faire découvrir?

Selection Stereo Utopia – Avril 2022
  1. Abstrackt Keal Agram Rivière : Un groupe rennais par lequel j’ai découvert l’univers du beatmaking au sens large.
  2. Farhot Reprensent Heart : Un extrait de Kabul fire vol1 de Farhot. Avec le volume 2 aussi, c’est deux albums que je trouve vraiment forts, une de mes dernières claque dans ce style musical.
  3. Bembeya Jazz National Armée Guinéenne : Morceau que j’écoute pas mal en ce moment.
  4. Selda Bağcanİnce İnce Bir Kar Yağar : pendant la création de La Terra Madre, j’écoutais beaucoup d’anadolu rock. Ce morceau est un classique du genre, samplé à maintes reprises. Selda Bağcan est une légende de la musique turque.
  5. The Comet Is ComingSpace Carnival : Un groupe que j’écoute pas mal en ce moment. Assez inclassable et très classe.
  6. The AlchemistFlight Confirmation feat. Danny Brown & Schoolboy Q : C’est un morceau de l’album Russian Roulette que je trouve magnifique.
  7. Charles Bradley & the Menahan Street Band How Long : Mon titre préféré de Charles Bradley et parce que je suis pas mal fan de tout ce qui sort chez Daftones Records.
  8. Rubba War Star : Morceau que j’ai découvert grâce à Madlib qui l’a samplé sur le premier album avec Freddy Gibbs.
  9. Mononome Loralai : un morceau du grec Mononome dont je suis pas mal fan aussi !
  10. Linkrust – Bag Gurl Funk : un beatmaker français trop méconnu comparé à son talent. Il fait lui aussi partie du collectif Tour de Manège

Des projets à venir?

J’ai un EP qui sort bientôt sous le nom de Spectateur cette fois, Nocturne, sur le label américain d’Emancipator, Loci Records. Il contient vachement moins de samples que d’habitude. Il y a plus de compos, c’est plus électronique mais toujours très contemplatif. On prépare aussi un autre opus de Stereo Utopia avec Melting Records mais on prend notre temps, on peaufine.

Spectateur – Under the Sun issu du nouvel Ep Nocturne à paraître chez Loci Records

Des dates de tournées à rappeler? en collectif ou en solo?

C’est pas prévu pour l’instant et j’ai pas mal de projets perso en ce moment qui prennent du temps. Mais pourquoi pas oui !

Retrouvez Stereo Utopia / Spectateur sur Youtube,Spotify, et Deezer.

Ecrit par :

Roxane Puthontheredlight / J’aime chiner les pépites dans les 1ères parties et les petits festivals underground. Toujours au taquet sur le dancefloor, on me trouve la plupart du temps devant la scène.
Chroniqueuse de charme pour les Sunday Morning et les lives reports.

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