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Les vraies filles ne sont pas parfaites et les filles parfaites ne sont pas vraies

Au commencement il y a cette phrase de Courtney Love, puis une réflexion sur le contenu de ma discothèque. Mes albums les plus trashs prônent carrément la culture du viol et les plus softs véhiculent quand  même des clichés de genre bien lourds. La plupart de mes disques de chevet cataloguent les filles : les babydolls, les bitches (beaucoup de bitches), les guerrières, les rebelles, les icônes… Arghh, j’ai envie de hurler, j’entends de nouveau Courtney “J’aimerais que toutes les filles se mettent à crier et prennent une guitare”, j’écoute les Slits à fond et j’ai envie de brûler mes disques !

Allumette dans une main et jerrican d’essence dans l’autre, je suis prête à embraser mes CD, quand le son des Beastie Boys m’interpelle. Le sample du flûtiste Jeremy Steig sur le morceau Sure Shot m’hypnotise tel un charmeur de serpent et j’entends au milieu du flow, des phrases appelant au respect de toutes les femmes, par ceux qui, quelques albums plus tôt, corroboraient les clichés machos les plus gros(siers).

Finalement, si les Beastie Boys ont évolué sur l’image de la femme au cours de leur discographie, il se peut que toute ma discothèque ne soit pas bonne à jeter et, derrière les punchlines bien provocantes de certains, se trouvent peut être des chansons bousculant les stéréotypes de genre.

Tout d’abord, il y a les artistes revendicatives et historiques. Les punkettes et les rockeuses : The Slits, Hole et Peaches.  Pas de doute, les paroles et les messages sont clairs, autant que leur nom de scène et ça fait du bien !

Puis, il y a les héritières, avec des styles plus actuels. On retrouve M.I.A, Janelle Monae. Les femmes occupent une place centrale dans leurs textes. Aussi, il est difficile de sélectionner un seul morceau.  Tout comme Jeanne Cherhal, même si le titre Je Suis Liquide m’est évident, c’est mon morceau ! Il est inspiré par Sonic Youth, commence par la douceur d’un ruisseau et finit par le tourbillon d’une chute d’eau.  

Il y a aussi des messages plus subtils : Valerie June dans son très beau Workin Woman Blues aborde la prostitution utilisée comme alternative à la misère.  Erykah Badu, elle,  dans le clip de Window Seat marche vers l’endroit où le président américain John F. Kennedy avait été abattu le 22 novembre 1963. Après s’être dénudée progressivement, la chanteuse finit par chuter et feint d’être assassinée par un tireur embusqué. Le clip a fait scandale lors de sa sortie et la chanteuse a été condamnée pour outrage.  Pour elle, le message libertaire du clip n’a pas été compris car « il est difficile d’accepter la nudité quand elle n’est pas une source de divertissement masculin. » Lhasa de Sela aborde la culpabilité, thème cher à Simone de Beauvoir, dans le très beau morceau La Confession.

La chanson Doo Wop (That Thing) de Lauryn Hill s’adresse aux femmes afro-américaines qui « essayent d’être hard rock alors qu’elles sont comme un joyau », peut être pour éviter de les réduire à une beauté exotique ou au fantasme de la guerrière. Lauryn Hill leur conseille de ne pas laisser « cette chose » (that thing) gâcher leur vie. Le morceau a été salué pour sa façon de promouvoir l’égalité entre les sexes lors de sa sortie.

Brown Skin Lady de  Black Star, dénonce la culture populaire qui érige les femmes blanches stéréotypées et photoshopées en exemple de perfection. On retrouve sur ce titre un sample de Gil Scott Heron issu du titre We Almost lost Detroit.

Morceau qui peut être rapproché de celui de Britney Spears, Piece Of Me qui dénonce le regard des magazines people sur les artistes, ici repris par Tricky.

Même si le titre Queen Bitch aborde la prostitution, David Bowie n’assimilait pas les travesti·e·s aux prostitué·e·s.  Bowie fut le premier gender bender mondial, quelqu’un qui dépassait les limites du genre. A une époque où le sigle LGBTQIA+ n’était pas né, il a donné de la visibilité aux travesti·e·s et aux transgenres. Combat, aujourd’hui mené par de nombreux artistes, comme Ezra Furman et le duo de rappeurs queers de Dallas, FAGedelics.

Toujours dans les albums récents, il y a la femme amoureuse par Angel Olsen et la rappeuse indienne Agsy qui dénonce le patriarcat écrasant de son pays.

Pour finir, il y a un crochet du coté du cinéma avec Joe Hisaishi, compositeur des films d’Hayao Miyazaki, avec qui il remet en question l’ordre de la domination masculine en valorisant les femmes, notamment dans My Neighbor Totoro.

Durant l’écoute de cette douceur japonaise, j’ai soufflé sur l’allumette, je me suis réconciliée avec ma discothèque, même si revoilà Courtney qui m’encourage à rester en alerte et active  « Go on, take everything, take everything ».

Texte : Carine Soubirant
Photo : Agnès Lortho

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